SOIGNEZ LA CULTURE, ELLE VOUS LE RENDRA BIEN

SOIGNEZ LA CULTURE, ELLE VOUS LE RENDRA BIEN

Brandir l’étendard de la culture comme plus-value ne date pas d’hier. Elle permet de générer de belles histoires. Encore faut-il savoir les raconter... Hirmane Abdoulhakime, Responsable Activation Culture & Entertainment chez Général Pop / BETC nous partage son avis et son expérience.

Quelle soit mise en avant comme plus-value au sein de son entreprise, qu’elle soit “utilisée” pour soigner son image de marque, ou pour sensibiliser à une cause et ainsi capter un nouveau public, la culture se voit côtoyer de plus en plus d’industries variées. La plus-value culturelle, ou la culture comme plus-value tout simplement, ne date pas d’hier, en ce qu’elle permet de générer de belles histoires. Mais comment bien les raconter ?

Certes elle dispose d’une force non négligeable. Mais il n’y a aucune évidence, car comme partout, rien n’est acquis. Et les risques sont gros. Une réappropriation maladroite ou une utilisation business trop grossière débouchera automatiquement sur un manque de légitimité et d’authenticité. Alors c’est simple, l’effet inverse que celui recherché se produit. Ce qui devait être alors bénéfique pour les deux parties, ne l’est dès lors plus pour personne et la collaboration n’est donc pas fructueuse. Ça semble logique sur le papier... pourtant c’est encore une véritable problématique aujourd’hui.

Comment est-ce possible ? La réponse est finalement aussi simple que le constat : manque d’investissement, manque de temps, mauvaise connaissance du terrain, pas de travail de veille, des one shot, trop d’intermédiaires, propos dilué, mauvaise réception du message... Alors comment avoir un résultat à la hauteur des attentes ? Avec des moyens à la même hauteur du résultat attendu. Quels sont-ils ?

Tout d’abord la connaissance du terrain. Il est essentiel de prendre du temps pour étudier le terrain, d’avoir les bons plug/relais, de miser sur un travail de recherche et de veille pour une bonne compréhension de son sujet. Par exemple pour réaliser l’expérience Hotel Eminente, toute l’équipe a passé du temps à Cuba, sur le terrain, pour retraduire au mieux l’atmosphère qui y régnait mais dans une « casa particular » basée sur Paris. Nous avons fait le choix de travailler qu’avec des personnes légitimes qui avaient vécu là-bas et de les consulter sur toutes les étapes de validation du projet.

BETC

Ensuite il faut être à l’écoute de tous les acteurs qui gravitent autour du projet. En étant à l’écoute de ses interlocuteurs, on soigne le relationnel avec eux, on arrive à retraduire leur volonté, et dès lors on devient légitime. Et sans légitimité, pas d’authenticité (et vice versa 😊) . Ce fut le cas notamment pour la dernière édition du LH Forum au Havre qui a pour ambition de sensibiliser le plus grand nombre à l’économie positive. Ici l’objet de notre collaboration était de leur proposer une programmation musicale qui fasse sens avec la cause défendue. Nous avons donc réfléchi à des artistes qui, en plus de donner un concert, seraient en mesure d’intervenir dans des talks pour inspirer la plus jeune génération. Pour faire rayonner un tel festival via des concerts, il est nécessaire qu’on sente un lien entre l’artiste et la cause.

BETC

© Arnaud Tinel - de gauche à droite : Audrey Tcherkoff, Martin Solveig, Myd, Jacques Attali, Kungs, Hirmane Abdoulhakime

Mais encore ? En supprimant les barrières. En les supprimant, on évite ainsi la multiplication des intermédiaires. La force de Général Pop et cela a toujours été également la philosophie de Fabrice Brovelli, c’est d’être en direct avec les artistes et leur management. Aujourd’hui, si beaucoup de deals n’aboutissent pas, c’est parce qu’il y a souvent trop d’intermédiaires : cela déshumanise la relation et rend plus compliqué le fait de sensibiliser un artiste à un projet au-delà de l’aspect financier. Et la culture c’est aussi avant tout de l’humain.

BETC

Hirmane Abdoulhakime & Virgil Abloh - Coachella 2019

Et avec trop d’intermédiaires on supprime cette valeur et surtout il n’y a pas cette appropriation nécessaire de la marque par l’artiste, comme c’est le cas dans la collaboration entre Booba et Puma, qui s’étend même au-delà de Booba puisque les artistes du label jouent le jeu et portent eux aussi la marque.

BETC

Enfin, on évite les one shot. Tout va trop vite aujourd’hui, le temps d’attention est ultra court. Or, pour raconter une histoire cela se fait sur plusieurs chapitres. Quand on arrive à avancer en harmonie on peut créer des événements successful, sur mesure et impactant. Et quand ça donne envie on ne s’arrête pas là. Et il faut insister sur ce point. Quand on lance une collab’, un partenariat, il ne faut pas que ce soit uniquement une question d’opportunité, il faut que cela fasse sens d’où l’importance de construire son territoire de marque.

C’est l’exemple des Grandes Eaux Électroniques et de Versailles Electro sur lesquels nous avons travaillé et qui sont maintenant des rendez-vous lisibles et attendus par les fans d’électro. Cela a été rendu possible grâce au travail des équipes du Château de Versailles qui sont d’incroyables techniciens (les lumières et projections synchronisées sur les musiques étaient dingues) ainsi qu’avec les artistes avec qui ils ont pu longuement échanger afin d’arriver avec une offre calibrée pour le château.

BETC

Alors on retient quoi ?

La culture comme plus-value n’est pas juste un moyen de capter une nouvelle audience dans un sens purement business. La culture il faut bien la soigner pour avoir des résultats, il faut l’appréhender d’une autre manière. Capter une nouvelle audience c’est aussi rendre accessible un univers à un public qui n’en avait pas forcément accès. C’est ouvrir un champ des possibles. Et au-delà de raconter des “histoires”, c’est surtout la possibilité d’en créer des “nouvelles” qu’il faut retenir, afin de tisser un lien différent avec les gens, qui peut dans certains cas dépasser la marque. 

Qu’on se le dise : on aime tous les belles histoires.

Alors donnons-nous les moyens de les rendre possible.

Hirmane Abdoulhakime

Voir aussi